Merci à vous pour tous ces messages qui sont à la fois dérangeants et encourageants. Je vais oser la rencontre avec les autres comme certains d'entre vous le suggère. Une première expo intime, réservée aux amis, dans mon jardin en juin que j'appellerai "jardin'art". Et puis sur la lancée, j'ai présenté un dossier de candidature pour exposer au Fort de Villès un lieu bien connu des nazairiens. Je vous tiendrai informés des dates. A cette occasion, j'ai été amené à rédiger un court texte pour expliquer ma démarche et je le partage avec vous qui êtes si élogieux.
L’art et la matière
Je suis un bricoleur dans mon cabanon.
Et ce qui en sort n’a de sens que par la médiation de l’autre, des autres, de celles et ceux qui les regardent, les touchent, s’en émeuvent, me poussent à poursuivre, me demandent de faire voir.
Je travaille le bois, le fer, le béton, le caoutchouc, juste pour l’envie et le plaisir de travailler la matière. De donner une forme, un sens, une certaine vitalité à ce qui, au départ, n’est qu’un rebut, informe, usager, sale parfois.
Mon travail consiste à trouver dans la matière même, dans sa texture, dans sa couleur, dans ses nervures, dans ses blessures, dans son histoire, les chemins d’une « parole » possible : qu’est-ce que ce bout de matière inerte me dit, me fait dire, me fait entendre.
Je regarde, je palpe, j’étire, je pétris, je mélange, j’associe, je découpe, je superpose, je colorie. La matière résiste ou cède, se prête ou se refuse. Je feinte, j’esquive, j’admets, je me soumets, je force. Ça craque, ça éclate, et dans ces déchirures, ces éclats, ces coulures, se forme un mot, un cri, un soupir, un sourire. La matière me parle et je l’écoute.
A chaque fois, c’est l’aventure. Des tentatives, des échecs, beaucoup d’échecs dont je garde trace comme des témoins de mes déambulations. Et parfois, grâce à la médiation de l’autre, ce que je considère raté, trouve un écho au détour d’une rencontre. Ce qui pour moi était un échec, trouve sa place dans ce flot de paroles. L’échoué dit quelque chose à quelqu’un. Et c’est tant mieux.
Au fil des rencontres, on me parle d’émotion, du plaisir des sens, toucher, caresser, sentir autant que voir, alors je retourne à mon cabanon.
Roger MOUSSEAU